Il y a toujours eu des libres penseurs, des esprits émancipés, des "briseurs" d'images. Epiame, Lucrèce, en furent, dans l'Antiquité, de remarquables exemples. On en trouve même dans les époques les plus sombres du Moyen-Age. Les Vanini, Giordano Bruno, Jean Huss, Dolet, etc., pourchassés, emprisonnés, réduits au silence, devaient très souvent s'expatrier. Par la force des choses, ils furent amenés à correspondre avec des penseurs, des savants de différents pays qui poursuivaient, de leur côté, la même oeuvre d'émancipation des consciences.
Au XIXe siècle, les libres penseurs ne sont plus obligés, en règle générale, de se cacher, d'agir clandestinement pour échapper à leurs tourmenteurs. Ils vont former des groupements, afin d'unir leurs efforts pour une efficacité plus grande.
Au moment précis où les anticléricaux révolutionnaires de France s'attaquaient aux privilèges du clergé (ce qui incitait la Papauté à organiser, contre notre pays, la croisade de toutes les têtes couronnées d'Europe), des mouvements rationalistes apparaissaient en Angleterre et aux États-Unis - l'ambiance du protestantisme étant, dans l'ensemble, moins hostile et moins réactionnaire que celle du catholicisme romain. Dès 1792, Thomas Paine, contemporain de nos Voltaire, Diderot, Holbach et autres courageux écrivains, dont la pensée féconde prépara l'immortelle explosion de la Révolution française, publia son livre "L'âge de la Raison". En 1831, le premier journal libre penseur paraissait à Boston. Il s'appelait " L'lnvestigator ", mais son existence fut de courte durée, en raison des poursuites dont il fut l'objet de la part des puritains. Mais, depuis 1873, les libres penseurs des États-Unis publiaient le "Truth Seeker ", qui est donc l'organe rationaliste le plus ancien du monde entier et qui en fut, pendant longtemps, le plus important.
Aux U.S.A., comme, en Angleterre et dans les pays du Commonwealth, la Libre Pensée se recrutait plutôt dans les éléments cultivés ou semi-cultivés. Les milieux ouvriers ne semblaient guère touchés par sa propagande. On sait qu'il n'en a pas été de même en Belgique, en Italie, en France. C'est surtout en France que cette action prendra le caractère social le plus accentué.
Dès 1835, on note les plus anciens de ces groupes européens, mais leur existence fut éphémère. Quant aux Carbonaris et aux Blanquistes, très actifs dans les pays latins, leur action fut de nature plutôt politique, mais cependant presque toujours nettement anticléricale. En 1847, un cercle de Libre Pensée était fondé à New-York, sous le titre "La Convention des Infidèles". En France, après le coup d'État de 1851 qui amena la chute de la deuxième République et le rétablissement de l'Empire, la plupart des militants libres penseurs durent s'expatrier. Certains se réfugièrent en Suisse ou en Angleterre, mais le plus grand nombre émigra en Belgique. Ils participèrent à la fondation des premières sociétés de Libre Pensée belge. Les plus anciennes (elles existent encore), sont “ L'Affranchissement ” et “ Les Solidaires ”, de Bruxelles, respectivement fondées en 1854 et 1857. Celle d'Anvers est également très ancienne.
Les proscrits français avaient d'excellents motifs pour être ardents ennemis du cléricalisme. L'attitude du Haut Clergé avait été ignoble dans la période qui suivit le 2 décembre. Pour s’en convaincre, il nous suffira de rappeler quelques-unes des apostrophes les plus cinglantes de Victor Hugo dans "Les Châtiments", "L'histoire d'un crime", “ Napoléon le Petit ”. Il fallut attendre la chute de l'Empire et la proclamation de la IIIe République pour que la Libre Pensée puisse agir au grand jour. Mais il ne faudrait pas en déduire qu'elle était demeurée inactive durant les dix-huit longues années du règne de "Badinguet". Notons pourtant que les libres penseurs de France, et particulièrement les proscrits du 2 décembre, ont joué un rôle de premier plan, d'abord dans la création de l'Association internationale des Travailleurs, plus connue sous le nom de "Première Internationale", et, ensuite, dans la fondation de la Fédération Internationale de la Libre Pensée. Nombre de militants ont, du reste, collaboré à ces deux illustres associations car, à l'époque, on ne séparait pas la Libre Pensée du Socialisme et de la Démocratie.
(source blog des Libres Penseurs des Yvelines)
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